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SALUT A MON VILLAGE!
      (1862)

 

Jean Baptiste Elizanburu

    (1828-1891)

 

La vie de ce labourdin est liée à l'armée. Sa carrière militaire a débuté en  Afrique où il a servi pendant quatre ans, puis il a grimpé dans la hiérarchie militaire. Il a été désigné au Premier Régiment de la Garde Impériale de Napoléon III et distingué par la Légion d'Honneur pour sa participation dans la campagne contre l'Allemagne en 1870. Républicain et critique à l'égard de la politique belliciste de l'empereur, il a trouvé refuge au Pays Basque où il s'impliqua dans la vie politique pour défendre ses idées de gauche. Il a écrit des chansons bucoliques sur des airs populaires qui ont connu un succès immédiat. Aujourd'hui encore, on chante ses paroles dans tout le pays. On estime qu'il est également à l'origine de nombreuses pièces anonymes, comme la célèbre Solferinoko itsua qui relate l'histoire de l'homme aveuglé dans la bataille de Solferino.

 

HIER ET AUJOURD'HUI

        Jean Baptiste Elizanburu , 1879

 

 

Je suis allé du sud au nord,

Du couchant au levant,

Et j'ai vu par-dessus tout

Beaucoup de naïveté de la part des hommes,

C'est pour cela que depuis toujours

Le malin vit le mieux de tous,

Sans rien faire,

Aux dépens des autres.

 

L'injustice s'installa dans le monde

Car la paresse en devint la maîtresse,

Quelques malins, il n'y a pas si longtemps,

L'ayant conquis tout entier

Et toi, paysan,

Du grain semé

Tu récoltes le blé ?

Le pain blanc est pour le malin !

 

J'ai appris aussi que le meilleur fourrage

N'était pas pour le cheval qui avait le plus peiné,

Que les poules, poulardes et poulets gras

N'étaient pas pour ceux qui les avaient élevés ;

Que les mets les plus fins

Les vins les plus doux,

Les meilleurs morceaux,

Étaient réservés aux malins.

 

De la naissance à la mort,

Ta place, paysan, était sous le joug ;

Et alors que tu usais ta vie au travail

Tu ne possédais pas un pouce de terre

Tout était aux autres ?

Quelle terrible injustice !

Tu vivais au rang des animaux !

 

Depuis vingt siècles ainsi allait le monde,

L'homme était l'esclave de l'homme ;

Placé par les habiles sur un trône d'or,

Régnait un monarque ;

Dans son entourage

Les paresseux

Vivaient à l'aise ;

Et nous nous battions conte le travail.

 

Camarades, il est difficile de croire aujourd'hui

À quel point les hommes autrefois étaient naïfs ;

Si tel était le bon vouloir du Roi

Les hommes étaient enrôlés par milliers

On leur faisait prendre des armes,

On les plaçait en rang,

On les envoyait à la guerre...

Et là c'étaient les innocents qui s'entretuaient.

 

Oui vraiment en ces temps malheureux,

Que de misère partout !

Les pauvres, tout nus sur les chemins,

Souvent morts de froid et de faim !

Parmi eux, combien de mères,

Les malheureuses, se traînaient,

Leurs enfants dans les bras ?

Les paresseux se divertissaient dans les palais !

 

L'heure arriva cependant

Où l'homme se releva

De sa misérable condition !

Et brisant les chaînes qui le soumettaient,

II conquit les droits de l'Homme !

Ce fut là, de nos ancêtres,

L'acte primordial

Le plus beau

Faire de l'esclave un Homme.

 

II y a à peine cent ans, chers camarades,

Que nous sommes traités comme des hommes ;

Autrefois, les uns étaient maîtres et les autres esclaves...

Comme s'ils n'étaient pas fils d'un père !

Depuis, les Hommes,

Grands et petits,

Riches et pauvres,

La Loi nous a mis au même rang.

 

Qu'il soit riche, qu'il soit pauvre,

L'homme est frère de l'homme.

Et vouloir s'élever en abaissant les autres

C'est nuire à son frère.

Se comprendre,

S'aimer,

S'entraider,

Voilà la véritable Loi de Dieu !

 

 

Traduction: Peio Heguy

Version originale": LEHEN ETA ORAI

 

© Jean Baptiste Elizanburu    

© Traduction: Peio Heguy    

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